O comme Origine Acrostiche pour décrire l’appellation Gigondas aujourd’hui et hier En 1971, Gigondas obtient le statut d’appellation d’origine contrôlée (aujourd’hui « protégée » à l’échelon européen). Ce label officiel garantit une provenance et le respect d’un cahier des charges. Un Graal qui consacre un terroir et un savoir-faire reconnu. Nous fêtons cette année le 50ème anniversaire de cette reconnaissance qui fut bien tardive au regard de la réputation dont jouissaient les vins depuis des siècles déjà. Pour preuve, à Gigondas, un règlement de 1591 encadre le commerce des vins aux étrangers, obligeant les vignerons à garder une partie de leur production pour les locaux. Cette anecdote est symptomatique du changement qui s’opère dans les goûts et la géopolitique du vin lorsque s’amorce l’Époque moderne. Les nectars bordelais et bourguignons n’ont plus le monopole de la qualité et les crus de la vallée du Rhône sont à leur tour dégustés sur les tables étrangères. Mais la culture de la vigne est bien plus ancienne encore que cela à Gigondas : elle remonte à l’Antiquité. Ce sont en effet les Romains, dont la présence est attestée par des chapiteaux, des colonnes et de très nombreux objets domestiques, qui apportent la civilisation du vin. On attribue aux vétérans de la seconde légion romaine, installée par César au Ier siècle avant notre ère, la création des premiers domaines viticoles. Les premières traces se trouvent à Saint-Cosme, avec des cuves taillées dans le roc qui ont servi à la conservation du jus fermenté. Ils plantent aussi des oliviers, qui se sont partagés avec les vignes les collines de Gigondas et le temps des Hommes pendant des milliers d’années : aux vendanges des raisins succède la récolte des olives. Le terrible gel de 1956 qui décime les uns et les autres marque un tournant. La culture du raisin sera désormais privilégiée. « Il n’existe pas de vignoble prédestiné, il n’y a que des entêtements de civilisation », affirmait l’écrivain Pierre Veilletet. Si la nature a offert à ce site les conditions propices à la viticulture, c’est le travail de générations de vignerons qui l’a transformé en un terroir à l’origine de vins uniques . Et c’est la conviction et l’audace de quelques-uns qui a permis à ces derniers d’entrer dans la cour des grands. Il faut saluer le militant républicain et grand voyageur Eugène Raspail qui, dès le milieu du XIXe siècle, comprend que Gigondas a tout pour devenir un terroir d’exception et développe le vignoble. Dans les années 1930, Pierre Amadieu est l’un des premiers à inscrire le nom de l’appellation sur les flacons et obtient de nombreuses récompenses agricoles. Les éléments étaient réunis pour la quête de l’AOC. Elle fut longue et semée d’embûches. C’est finalement grâce à la persévérance de François Ay, président du syndicat de l’appellation pendant près d’un quart de siècle, portée par un effort collectif, que Gigondas devient Cru des Côtes du Rhône. C’est le début d’une autre histoire, que nous vous racontons dans ces billets. À Gigondas, l’origine renvoie au temps et à l’espace. Enracinée profondément dans la terre, elle est le fruit des amours très anciennes de la Nature et de la Culture.